J’ai déjà fait plusieurs articles sur l’attention, mais certain(e)s de mes correspondant(e)s me demandent de revenir sur ce sujet pour essayer de mieux comprendre le phénomène et de se demander si on peut améliorer ses capacités d’attention, qui manquent tant aux jeunes actuellement.
L’attention, c’est la faculté de se concentrer sur un objet, un livre que l’on lit, un exercice que l’on fait et plus généralement une action, pour la mener à bien au mieux, sans se laisser amener à penser à autre chose, à être distrait.
Alors d’abord comment cela se passe t’il et qu’est ce qui peut nous distraire?
Nos cinq sens (sans compter les sensations internes à notre corps), recueillent des perception 40 fois par seconde, via le thalamus. Heureusement ces sensations n’ont qu’une vie très courtes pour la plupart de quelques secondes seulement, et restent dans notre inconscient. Certaines sont conservé plus longtemps et soumises à notre cortex frontal, trois à cinq fois par seconde, pour savoir s’il les juge importantes et s’il veut que nos sens continuent à recueillir cce type de sensation sur un sujet donné.
Si par la suite ces sensations n’ont plus d’intérêt, elles seront éliminées en particulier pendant le sommeil. Si au contraire le cortex préfrontal veut en conserver la trace, il donnera l’ordre à l’hippocampe de les mettre en mémoire en renforçant les liaisons entre les neurones composant le souvenir; le sommeil renforcera encore ces connexions.
Il faut aussi savoir qu’une réaction du cortex préfrontal met quelques dixièmes de seconde s’il sait ce qu’il doit faire et plusieurs secondes s’il doit réfléchir avant de passer à l’action.
Enfin les expériences ont montré que le cerveau n’est pas multitâches, qu’il peut à la rigueur suivre deux processus à la fois (mais par « saccades » successives de chacun), et qu’alors il partage son énergie entre les deux tâches et est donc moitié moins performant. Quant il veut traiter 3 opérations simultanément, cela commence à être anarchique
Voilà ce qui se passe quand nous ne sommes pas concentrés sur une tâche particulière.
Voyons maintenant ce qu’il se passe si nous faisons attention à quelque chose.
D’abord le cortex préfrontal donne des ordres au thalamus et aux centres moteurs, (notamment des yeux), pour que les perceptions des sens soient tournées essentiellement vers l’objet de notre attention, pour ramener le maximum d’informations permettant de guider nos actions.
Mais le thalamus continue à remonter des informations, certes mains souvent. Si nous faisons attention à une tâche et que l’information remontée est celle d’une mouche qui se promène autour de vous, le cortex frontal refusera l’information ou tout au plus donnera l’ordre aux centres moteurs, dirigés par le cervelet, de chasser la mouche d’un mouvement instinctif du bras. il fera comprendre au thalamus qu’il faut rester concentré sur la tâche.
Evidemment si c’est un événement qui risque d’être nocif (par exempel une pluie d’orage qui rentre par la fenêtre ouverte), là le cortex frontal pourra juger qu’il faut abandonner la tâche une minute, pour fermer la fenêtre.
L’attention c’est donc un tri de l’importance des sensations qui sont communiquées au cortex préfrontal, le chef d’orchestre du cerveau, et le refus pas celui-ci d’accorder de l’importance et donc de l’attention aux événements qui ne sont pas essentiels. Le thalamus fait un premier tri et il est aidé par le cerveau émotionnel, notamment le cortex insulaire et l’insula, ainsi que les centres amygdaliens qui évaluent les dangers, qui évitent que le cortex préfrontal soit dérangé pour des choses non urgentes.
Que faire pour améliorer notre attention.?
On ne peut pas éliminer ces alertes envoyées au cortex préfrontal, et l’analyse qu’il est tenté d’enfaore avec l’aide du cerveau émotionnel. Les psychologues appellent cela des « Propositions d’action immédiate » (PAM).
Il faut donc voir comment ne pas leur donner trop d’importance, d’attention.
Il y a d’abord un problème de motivation et de volonté. Si l’objectif de notre tâche est précis, important pour nous, si cela nous plaît ou au moins nous paraît nécessaire, nous aurons une motivation suffisante et la volonté de refuser de nous laisser entraîner par les alertes qui arrivent et ne sont pas essentielles.
Si notre objectif est flou, et en nous apparaît pas comme important, les PAM vont devenir nombreuses et envahissantes et nous ne saurons pas les repousser suffisamment.
Bien sûr si un élève n’a pas son portable en classe, il ne sera pas distrait par un SMS, mais il trouvera un autre sujet de distraction. Il ne sera attentif que lorsqu’il aura compris que suivre le cours, faire l’exercice est indispensable pour progresser, pour avoir un niveau suffisant, réussir les examens et qu’il prépare ainsi sa vie future. Il faut qu’il comprenne que le manque d’attention permanent au cours augmente ses chances futures de chômage.
Vous me direz que cela est bien général. oui mais c’est le moteur initial.
Ensuite il faut faire comme fait un ingénieur quand il mène un projet : il faut bien préciser les objectifs, les décliner en sous objectifs puis en mini et micro objectifs qui sont des tâches élémentaires. Le cortex préfrontal a ainsi un chemin tracé à l’avance et il peut se concentrer sur la réalisation de chaque micro-tâche.
Bien plus;, alors que l’objectif général reste un peu philosophique et lointain, le micro-objectif étant précis et limité, sa réussite est une étape et déclenche dans nos centres d’apprentissage et de récompense une bouffée de dopamine, source de plaisir.
Cela nous aidera à passer à la micro-tâche suivante sans nous laisser distraire.
Il est certain que la réussite est source de motivation. Mais elle demande deux choses : de l’attention et de l’apprentissage, et ce dernier demande la compréhension et la répétition pour mémoriser. La meilleure façon d’apprendre, c’est la répétition des exercices d’application; mais évidemment c’est un travail et cela prend du temps alors que ce serait plus agréable de flâner ou de s’amuser, les occupations ne manquant pas sur tous les écrans à notre disposition.
il y a là un défi pour les professeurs et les parents, d’habituer l’élève à faire des exercices, à y trouver une certaine satisfaction et de lui faire comprendre que c’est essentiel pour sa mémoire et son intelligence.
C’était plus facile autrefois, car il y avait moins de distractions possibles, ni la télé, ni internet, ni le téléphone portable.
Et acquérir certains automatismes est source de plaisir. Il est certain que le début de l’apprentissage du tennis ou de la planche à voile est décevant car on échoue le plus souvent, puis tout à coup, à force d’essais on acquiert une certaine habileté et avec elle la réussite. De même lorsqu’on apprend à lire ou la pratique d’un instrument de musique.
Il faut arriver à donner à l’enfant le goût de la recherche de la réussite.