
Depuis huit jours on reparle beaucoup dans les journaux télévisé de l’euthanasie et je suis assez effaré de l’intolérance dont font preuve les gens interrogés et notamment les membres du gouvernement, monsieur Fillon en tête. Je croyais que la France était un pays laïque !
Je comprends très bien que l’on soit pour ou contre l’euthanasie, mais pourquoi vouloir imposer son opinion aux autres ?
Les gens sont très divisés sur ce problème, et leur opinion est souvent liée à leurs croyances religieuses.
Mais il ne s’agit pas de forcer les gens à pratiquer l’euthanasie, mais simplement de voir comment on pourrait satisfaire toutes les aspirations profondes, tout en respectant la liberté de chacun et en évitant les abus, les déviances, voire des crimes.
Refuser dans ce domaine une large concertation me paraît être un manque de tolérance, voire d’intelligence.
Il est bien évident que l’euthanasie ne peut être autorisée sans un encadrement rigoureux. Sinon c’est la porte ouverte à n’importe quoi.
A la limite à des crimes, car certains demanderont la mort d’autres pour disposer de leurs biens ou parce qu’ils les haïssent.
Mais aussi des gens un peu simplets croiront bien faire en “rendant ce service” à un proche.
Il faut donc fixer des règles préalables et établir un contrôle précis pour éviter les abus et les déviances.
De même il ne s’agit pas de forcer quelqu’un à s’euthanasier ou à demander ou pratiquer l’euthanasie d’un autre, si cela va contre sa conscience.
Je suis personnellement sur ce point tout à fait respectueux des opinions des autres vis à vis de leur propre comportement.
Mais à mon avis, cela ne leur confère pas le droit d’obliger les autres à penser et agir comme eux (exactement comme pour l’avortement avant 12 semaines).
A mon âge on a vu mourir bien des gens autour de soi et on sait que cela vous arrivera un jour. On sait pour l’avoir vu, que, même si on n’a pas peur de la mort, elle peut dans certains cas être synonyme de grandes souffrances et cela sans aucune utilité ni espoir, car la personne était condamnée et vouée à une mort certaine à court terme.
Si ces personnes souhaitent être prolongées jusqu’à la fin, il faut évidemment les soigner avec dévouement.
Mais faut il obliger les gens à souffrir, alors qu’ils souhaiteraient en finir avec une vie qui ne leur apporte plus que cette souffrance ?
La loi s’est améliorée et il y a les “soins palliatifs” et l’interdiction de “l’acharnement thérapeutique”.
La loi Léonetti du 22 avril 2005, limite l'acharnement thérapeutique et repose sur une éthique fondée sur l'acceptation de la mort et exprimée par la formule « Laisser mourir sans faire mourir ». Elle confirme et codifie des pratiques existantes, comme l'absence d'obstination déraisonnable ou le droit au refus de soins et permet de prendre en compte les directives anticipées, exprimées par une personne à l'avance, tant qu’elle est encore en état de les énoncer avec toute sa connaissance.
Pour donner ses directives anticipées, il suffit d’indiquer par écrit ses nom et prénom, sa date et son lieu de naissance, et de stipuler ses souhaits. Le document doit être daté et signé et est valable trois ans.
La loi dit que les actes d’acharnement thérapeutique « ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable. Lorsqu'ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou n'ayant d'autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris. Dans ce cas, le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa vie en dispensant les soins visés à l'article L. 1110-10. ».
Mais la loi exclut toutefois explicitement le suicide assisté et l'interruption du processus vital des personnes en fin de vie.
J’ai personnellement été témoin des souffrances d’une personne, à laquelle les médecins avaient dit qu’elle ne vivrait pas plus de huit jours, qui avait demandé de la laisser mourir et d’arrêter les soins, ce qu’on fait les médecins, mais qui a mis trois semaine à mourir et a beaucoup souffert sans aucune nécessité.Certes les médecins ont atténué la souffrance physiologique, mais la psychique, ils ne savent pas faire, sauf peut être la transformer en légume par des psychotropes, mais alors est ce différent de la mort ?
On peut évidemment toujours espérer un miracle, mais je n’en n’ai jamais vu à ce stade terminal d’une maladie devenue incurable.
Qu’il faille que la personne l’ait demandé explicitement, qu’il y ait des témoins, qu’il y ait un comité d’éthique médical, que la famille n’ait pas le droit de telles pratiques, mais qu’elles soient le fait du corps médical, que des règles strictes soient imposées en milieu hospitalier, et qu’il y ait déclaration et une enquête postérieure pour vérifier que les règles ont été respectées, je suis d’accord que tout cela doit être réfléchi, codifié.
Mais ce que je ne comprends pas c’est qu’on refuse à certains qui souffrent, ce droit de disposer d’eux même, sous prétexte que certains (en général aisés et bien portants), pensent dans leur foi religieuse, qu’il ne faut pas attenter à sa vie et que celle-ci est entre les mains de leur Dieu.
Je trouve très normal qu’ils appliquent leurs valeurs à eux mêmes, mais pourquoi l’imposer aux autres dans un pays où on prône la laïcité comme une valeur républicaine ?
Et j’ai été surpris juste après la déclaration de monsieur Fillon, par les propos d’un médecin, qui disait que pour beaucoup de cliniques privées, les lits de soins palliatifs étaient ceux qui étaient les plus rentables et qu’il ne fallait donc pas que les patients meurent trop vite.
Je n’ai aucun moyen de vérifier cette assertion, mais elle m’a profondément choquée, - si elle est vraie, par cette intrusion de l’argent et de la politique dans un domaine humain et moral qui est scandaleuse, et - si elle est fausse, d’avoir osé dire cela.
Je pense aussi que nos politiques dans la force de l’âge, qui gouvernent et légifèrent, devraient aller visiter les services de soins palliatifs et les maisons de retraite, où beaucoup de vieillards meurent dans la souffrance.
Ils verraient alors ce qui leur arrivera un jour et peut être auraient ils moins tendance, comme actuellement, à démanteler les hôpitaux publics.
Il est connu que dans certains pays, le possible recours à cette pratique donne aux médecins licence de ne pas faire tout ce qu'ils pourraient pour sauver une vie. Combien de cas de malades dénombre-t-on qui préfèrent ainsi venir se faire soigner en France ? Le problème peut sembler distinct, il est pourtant profondément lié à l'autorisation de l'euthanasie. D'ailleurs, même en légiférant étroitement les pratiques, on n'empêche jamais les abus : les lois sont plutôt faites pour mesurer les sanctions justes en cas d'infraction que pour être suivies à la lettre (ce qui serait hautement utopique !). Alors concernant l'euthanasie, en cas d'abus il y a meurtre, et un meurtre c'est toujours grave.
Pour autant, sur le point de la dignité, je m'accorde avec toi. Il est anormal qu'une personne qui le souhaite ne puisse en finir rapidement avec ses souffrances lorsqu'elle n'a aucun espoir de guérison. Et la loi contre l'acharnement thérapeutique, malheureusement, ne suffit pas assurer cela. Tout faire pour soigner quelqu'un qui aura ensuite un avenir, oui ; injecter la vie de force dans un corps aux trois quarts hors d'usage de toute façon, je trouve ça répugnant. Alors je ne sais pas... Je me sens un peu perdue dans ces questions-là parce qu'elles me semblent sans issues : quoi qu'il en soit, il faut accepter une horreur qui se produira à coup sûr.